Par Yannick Brard, Membre de l’exécutif national et délégué du MUP Val d’Oise.
Un récent rapport sénatorial de la délégation à l’aménagement et au développement durable du territoire tend à définir le nouvel espace rural français.
Ce rapport très complet brosse le portrait de l’émergence d’une « nouvelle société rurale, moins coupée de la vie urbaine, plus ouverte vers l’extérieur et particulièrement accueillante ».
Même s’il est sujet ici de redéfinition du paysage rural et de sa composante démographique, il est un aspect à l’ouverture du salon de l’agriculture qui devrait, il me semble, retenir notre attention, l’état de l’agriculture française.
Il est dit : « L’agriculture demeure une activité structurante de l’espace rural, confrontée cependant à une réduction et à un vieillissement de ses effectifs ”.
En effet, bon nombre d’agriculteurs continuent leur activité faute de pouvoir transmettre à leurs descendants une exploitation exsangue et qui nécessite, le plus souvent, de lourds travaux pour rester compétitifs. S’ajoute à cela un accroissement constant du parcellaire, rendu obligatoire pour la rentabilité, accroissant les surfaces agricoles d’un seul tenant, difficilement transmissibles lors de successions ou de passation d’activité.
La Commission des comptes de l’agriculture de la Nation, en date du 12 décembre 2012, pointe une amélioration de 4% du revenu des agriculteurs (notons que, globalement, l’évolution du revenu agricole en France est supérieure à la moyenne européenne.) et met en avant de fortes disparités entre les filières.
La progression profite surtout aux exploitations de grandes cultures dont le résultat avant impôt atteint 74 400 euros en moyenne.
Pour les fermes spécialisées en céréales, oléagineux et protéagineux, le revenu augmenterait presque de moitié en un an à 72.100 euros en raison de la flambée des cours.
Mécaniquement, les éleveurs de bovins et d’ovins voient leurs revenus baisser, ce à cause de la hausse des prix des aliments. La dernière affaire de la viande chevaline n’améliorera pas cette situation déjà tendue.
Le revenu des éleveurs laitiers recule de 10%, à 26 500 euros et ceux des producteurs de viande bovine perdraient 8%, à 15 400 euros.
La viticulture, avec un revenu qui s’effondre à 22 800 euros contre 46 500 euros en 2011, reste un des secteurs le plus en crise et le plus enclin aux disparités (les grands crus, certains liquoreux, tirent vers le haut les vins de pays mais dans cette catégorie certains agriculteurs vivent avec moins de 600 euros par mois).
Comme je le dis souvent, il n’y a pas d’agriculture, mais des agriculteurs ! Selon l’INSEE, le revenu agricole a progressé de 6,2 % en 2012 en France. Mais il faut prendre en compte que la croissance du revenu agricole moyen en France n’est possible que par la baisse du nombre d’actifs agricoles ! Et surtout quelle disparité entre les différentes filières !
Le sauvetage récent de la PAC, même s’il faut s’en féliciter, ne réjouit qu’en partie les agriculteurs français qui, pour certains, préféreraient vivre de leur revenu qu’a travers des aides à la répartition souvent contestée.
Pourtant, des solutions émergent ave notamment le développement des circuits de distribution courts et une répartition territoriale différentes des cultures. Pour exemple, en Ile de France, 89% des terres sont en oléagineux protéagineux et betteraves contre 0,8 % en fourrage, avec 7% d’exploitation en élevage. A contrario, en Limousin, 85 % d’élevage ce qui occasionne dans certaine région des coûts exorbitants pour l’alimentation animale.)
Je reviens donc à mon propos de départ sur le rapport sénatorial. La ruralité est essentiellement liée à la présence des agriculteurs et si, dans certaines régions, la campagne attire une nouvelle catégorie de ruraux, c’est souvent du fait d’une proximité avec des centres urbains. Mais, est-ce le cas sur l’ensemble du territoire français ?
La désertification de certaines régions est liée à l’arrêt de l’activité agricole, et ce n’est pas l’implantation de points multiservices (poste, épicerie…) ou l’arrivée du tgv, souvent d’ailleurs au dépend de trains régionaux, qui permettra aux villages excentrés de survivre.
La gauche a souvent délaissé le secteur agricole et, pourtant, la situation de précarité de certains agriculteurs devrait nous alerter. Comme pour le secteur industriel, travaillons au redressement productif de l’agriculture française et relevons le défi d’une agriculture productive et responsable structurante de notre territoire !