Pour la première fois, à l’occasion du scrutin européen, les bulletins blancs seront décomptés à part, mais ils ne seront pas pris en compte dans les suffrages exprimés.
C’est l’une des nouveautés du scrutin du dimanche 25 mai. Pour la première fois depuis 1852, les bulletins blancs – mais aussi les enveloppes vides – seront décomptés séparément et figureront en tant que tels dans les résultats. Jusque-là, ils étaient assimilés aux bulletins déclarés nuls, parce que déchirés ou annotés. Or, pour les promoteurs de la loi du 21 février 2014, il était important, dans une période où l’abstention ne cesse de progresser, « de rendre justice aux électeurs qui font l’effort de se déplacer à un bureau de vote et d’accomplir leur devoir civique ». Ils espèrent surtout que cette « reconnaissance » offre une alternative aux électeurs tentés par l’abstention ou le vote en faveur des extrêmes.
Bien que relativement marginal, le vote blanc est en légère augmentation depuis quelques années. Il a atteint près 6 % au second tour de l’élection présidentielle de 2012. Lors du précédent scrutin européen, les votes blancs et nuls représentaient 4,30 % des votants. On est très loin du taux d’abstention, qui pourrait, selon les estimations, dépasser les 60 % dimanche 25 mai, mais ce n’est pas non plus tout à fait négligeable. Certains mouvements politiques ont d’ailleurs décidé d’en faire une arme électorale.
Le vote blanc, une épée de Damoclès
Le MUP (Mouvement unitaire progressiste) de Robert Hue, qui considère qu’il appartient à la majorité – il a soutenu François Hollande en 2012 – mais ne se reconnaît pas dans la position du PS sur l’Europe, a décidé d’appeler à voter blanc, se démarquant du MRC de Jean-Pierre Chevènement, qui a appelé au boycottage de l’élection. « Le vote blanc est un outil institutionnel qui nous permet d’exprimer quelque chose d’autre que l’abstention. C’est un acte politique. C’est au contraire un vote contre l’abstention », estime l’ancien dirigeant communiste, pour qui il s’agit toutefois « d’un outil conjoncturel à ne pas utiliser en permanence ».
Même s’il devait être plus important, le vote blanc n’aura cependant aucune incidence directe sur le scrutin, puisque les parlementaires n’ont pas souhaité qu’il soit pris en compte dans le calcul des suffrages exprimés. Il permettra simplement de mesurer le poids de ceux qui, tout en étant attachés au vote, ne se reconnaissent pas dans l’offre politique actuelle.
C’est pour protester contre ce qu’il qualifie de « supercherie » que l’association « Les citoyens du vote blanc » présente des listes dans six circonscriptions. Stéphane Guyot, son président, concède qu’il y a un certain paradoxe à appeler à voter pour ses candidats quand on défend un « non-choix » : « Sur la forme, c’est un peu décalé, mais il s’agit pour nous d’un débat démocratique essentiel. » Pour lui, la loi votée en début d’année ne changera rien, puisque les bulletins blancs sont déjà décomptés, les votes nuls étant très marginaux. « Le seul intérêt du vote blanc, c’est d’exercer un contre-pouvoir, de faire peser sur les candidats la menace d’être mal élu. Sans cette épée de Damoclès, la loi ne sert à rien », regrette-t-il.
Un article paru dans La Croix du 22 mai 2014. Par Céline Rouden.
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