Interview exclusive de Robert Hue parue dans Le Figaro du 1er février 2013.
Par Albert Zennou. Cliquez sur la photo ou ce lien pour voir l’article dans le journal.
LE FIGARO – La lettre stratégique du Front de Gauche marque une opposition franche au gouvernement. Êtes-vous surpris?
Robert HUE – C’est un texte qui affirme que l’ensemble des forces qui composent le Front de gauche, donc le PCF, se situent nettement et sans ambiguïté dans l’opposition.
Invoquer une dérive à droite du PS permet de présenter le Front de Gauche comme une alternative gauchisante. Mais ça ne marche pas. Sans alliance dans la diversité de toutes les forces de gauche, le risque est grand est de remettre au pouvoir une droite décomplexée et dure. Aucune alternative progressiste ne peut naître d’une stratégie opposant une partie de la gauche contre l’autre, comme le fait le Front de Gauche. Le laisser croire relève d’une mystification pour la gauche comme pour les Français. Ce choix stratégique est clairement une impasse.
Pourquoi le PCF a-t-il signé ce texte?
Le PCF n’avait guère le choix. Le fait qu’il n’y ai pas eu de candidats à la présidentielle a conduit le PC à soutenir un candidat, Mélenchon, qui désormais, que cela plaise ou pas au PC, est leader du FdG. Aujourd’hui, ce texte est fidèle à la pensée de Mélenchon, celle qu’il développe depuis des mois. Le PCF n’a plus le choix, car au sein du FdG, c’est Jean-Luc Mélenchon qui triomphe. C’est le PC qui est venu sur la ligne de Mélenchon, pas l’inverse.
Jean-Luc Mélenchon joue-t-il la défaite de la gauche?
À bien des égards, ce comportement laisse entendre que le FdG pense qu’il y aura un échec du gouvernement et du président. Qu’on le veuille ou pas, c’est miser sur une stratégie d’échec.
Votre parti, le Mouvement unitaire et progressiste, peut-il fédérer cette partie de la gauche de la gauche?
Nous avons constitué le Mouvement unitaire et progressiste (MUP) il y a trois ans parce que nous pensons qu’il faut fédérer la gauche. Mais dans la situation présente, nous soutenons le président de la République. Nous voulons que la gauche réussisse.
La lettre remet-elle en cause des alliances possibles pour les municipales?
Elle aborde en effet les municipales. Il y est annoncé que même s’il y avait des alliances, elles ne seraient que conjoncturelles et qu’au fond, la politique est de combattre le gouvernement. Ce texte est un tournant qui vient à la veille du congrès du PC. Or, une partie importante de l’électorat communiste ne se retrouve pas dans cette dérive anti socialiste. Mélenchon n’arrête pas de dire que Hollande a été élu avec ses 4 millions de voix obtenues au 1er tour. En vérité, même sans son soutien, qui n’en était pas vraiment un, François Hollande aurait été élu. Beaucoup pensaient que le FdG serait dans une sorte de soutien sans participation au gouvernement. Aujourd’hui, il n’y a plus ni soutien, ni participation.