Les paléontologues ont caractérisé les extinctions successives affectant la biosphère terrestre (faune et flore) depuis l’Ordovicien (ère Primaire) jusqu’au Crétacé supérieur (fin du Secondaire) en constatant à chaque crise une disparition d’au moins 70% des espèces dans les strates correspondantes. Plusieurs facteurs ont sans doute induit ces changements globaux sur Terre : courte période glaciaire affectant l’océan primitif (Thalassa), dérive des continents par la tectonique à partir de la Pangée, éruptions volcaniques et même chute d’astéroïde au Mexique (disparition des dinosaures).
Dans les derniers instants de notre planète à l’échelle des temps géologiques, qui n’a pas constaté en partant en vacances en voiture sur de longs trajets la quasi absence d’insectes écrasés sur le pare-brise ? Qui n’a pas été surpris par le silence lié à l’absence des oiseaux lors d’une promenade au travers des bois ?
Du local au global, 20 à 30 % des espèces animales vont disparaître d’ici 2050. Le taux d’extinction des espèces, « sans précédent », s’accélère et concerne désormais plus d’un million d’espèces.
Les facteurs responsables sont désormais clairement identifiés par les chercheurs, soit par ordre décroissant : les changements d’usage des terres (agriculture productiviste, déforestation, étalement urbain…) et de la mer (pêche intensive, déchets plastiques et marées noires…), l’exploitation directe de certains organismes, le changement climatique, la pollution, les espèces exotiques envahissantes.
« Nous sommes en train d’éroder les fondements mêmes des économies, nos moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la santé et la qualité de vie dans le monde entier ». Ce sombre pronostic est celui de l’IPBES, fondation intergouvernementale pour la recherche sur la biodiversité, qui regroupe 145 experts issus de 50 pays.
La relation entre les trajectoires de développement économique et leurs impacts sur la Nature depuis 1850, avec le renouvellement des moyens de production et le développement industriel est établie. Il ne suffit donc pas de vociférer contre le « capitalocène » et de promouvoir une soi-disant « planification écologique », pas plus que de déclarer « entrer en résistance » au risque de ne pas être audible sur les mesures à prendre dès à présent.
La création en 1967 des parcs nationaux ou régionaux (54 en 2019) avait pour vocation d’asseoir un développement économique et social du territoire « durable ». Cette vision obsolète que déclinent les chartes régionales reflète une vision passéiste des territoires prétendument figés. Le cultivateur idéal serait de façon symbolique l’Angelus de Millet et la « Nature », un simple cabinet de curiosités du terroir pour les touristes.
Lancés en 1982, les inventaires ZNIEFF (inventaire des zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique) ont cependant permis de protéger de grands ensembles d’écosystèmes terrestres et marins, de préciser les potentialités biologiques et identifier l’ensemble des espèces protégées. Il convient de souligner ici le caractère remarquable du développement par le Muséum National d’Histoire Naturelle d’une science collaborative, sous la forme d’observations bénévoles effectuées par des amateurs permettant d’agréger les données d’un territoire et de préciser de façon dynamique l’évolution des écosystèmes.
Le Mouvement des Progressistes suggère d’instaurer la primauté du vivant sur toutes les considérations d’aménagement. Un crapaud « vaut » plus qu’un parking de supermarché, une zone humide qu’un barrage d’irrigation agricole, un lys martagon qu’une plantation de résineux…
Le Mouvement des Progressistes se félicite que le programme européen Natura, créé en 2000, rassemble désormais des sites naturels ou faiblement anthropisés à forte valeur patrimoniale. Des espèces et habitats sont ainsi protégés, soit 7 millions d’ha, mais ce n’est toujours pas suffisant.
A terme, faudra-t-il peut-être reconsidérer le droit de la « nature » en lui conférant une personnalité juridique, au même titre que tous les « usagers » sans exclusive d’un milieu. « Des manières inédites d’habiter la Terre et de cohabiter avec les non-humains sont devenues indispensables » (P.Descola, 2017, Les Natures en question).
Les zones à défendre (ZAD) constituent une réponse locale alternative face à des enjeux sociétaux et écologiques indissociables qu’il convient de toujours préciser.
Le Mouvement des Progressistes reste persuadé de la pertinence de la démocratie participative des habitants, aidés en cela par des expertises scientifiques indépendantes.
Jean Couthures, délégué national du MdP à l’écologie