Je considère tout d’abord que, bien que ce soit un ouvrage personnel et même intime, le livre de Robert Hue – Les partis vont mourir…et ils ne le savent pas! – constitue pour les progressistes un outil essentiel. Il contient non seulement une analyse finement dialectique des évolutions politiques des dernières décennies, mais encore un fabuleux éclairage sur ce qui se passe en ce moment même en France et en Europe. On saisit parfaitement à sa lecture les facteurs qui ont présidé et président au tournant de la fin août en même temps que la logique à l’œuvre depuis le début du quinquennat.
On entend certains, à gauche notamment au PS et dans les médias, opposer une « social-démocratie », chimiquement pure à un « social-libéralisme » pathogène. Je pense que c’est une erreur même si cela illustre un aspect de la spécificité de la gauche française. En effet, la forme de la social-démocratie, partout dans le monde (sauf en Amérique latine et encore !), est depuis la fin des années quatre-vingt celle du social-libéralisme. C’est-à-dire le renoncement à l’État social, en théorie comme en pratique. L’abdication devant le capitalisme n’est pas nouveau pour le courant réformiste, elle a commencé dès son apparition, en Allemagne, en France comme en Angleterre, alors que les partis sociaux-démocrates étaient bien loin du pouvoir. Ce n’est donc pas cette abdication qui caractérise l’évolution de la politique gouvernementale actuelle mais le renoncement à l’État social et donc à toute maîtrise de l’économie, à toute régulation, par les voies d’un secteur public et d’une politique économique (notamment industrielle). Ce n’était pas encore le cas sous Mitterrand et lorsque la « gauche plurielle » était au pouvoir, même s’ils en existaient des prémices. Valls est l’archétype de CE social-libéralisme là.
Cependant, spécificité française, il existe une résistance importante, au sein de la gauche et au sein même du PS, à l’abandon de la social-démocratie traditionnelle, liée à la réalisation de l’État social, même minimum, voire d’un État industriel (Montebourg). C’est cette fracture qui produit les secousses sismiques actuelles.
Ces secousses amplifient, en retour, la crise politique que Robert Hue analyse avec brio dans son livre. On disait les idéologies mortes, or c’est une extraordinaire bataille idéologique qui se déroule actuellement. L’issue en est pas seulement le sort du pays, de l’Europe, mais celui de la gauche. Si Valls a raison sur une chose, c’est bien quand il déclare que la gauche peut disparaître. Sauf que Robert Hue l’avait dit avant lui, que nous faisons tout, nous et d’autres, pour qu’il n’en soit pas ainsi alors que lui fait tout pour qu’il en soit ainsi.
Dans ces conditions, en continuant de populariser nos analyses et nos propositions (le livre en est une excellente synthèse), il nous faut tout faire pour le rassemblement de toutes les forces qui, à gauche et même au de-là, s’inquiètent des processus en cours, refusent l’abandon pur et simple du rôle social et régulateur de l’État et veulent assurer le progrès démocratique, social, économique et écologique.
Une réponse
Le 25 mai 2017 , 3 après la parution de ce livre R. Hue avait vu presque tout juste .