Daniel Gilles, Vice-président du conseil régional de Bretagne et animateur de l’association Vent d’Ouest, recevait avec quelques amis élus et citoyens Robert Hue, Président du Mouvement Progressiste (MUP) et Sénateur : l’occasion d’échanges et de revenir sur leur démarche.
Pour lire l’article publié dans Ouest France, cliquez sur ce lien : Municipales. L’ancien communiste lorientais Daniel Gilles rejoint Robert Hue
Daniel Gilles, vous animez les rencontres vent d’ouest où vous invitez depuis 2007 toutes les sensibilités de gauche. Quels enseignements avez-vous tiré des dernières ?
Daniel Gilles : C’étaient les 7e, et les secondes depuis le changement de majorité de gouvernement et de président en mai 2012. Si l’an dernier l’ensemble des participants s’étaient, de façons diverses, félicités de ce changement et avaient exprimé leurs souhaits de voir redresser le pays, engager des réformes progressistes et s’attaquer aux inégalités, cette fois, de Jean-Yves Le Drian à BernardThibault, aux 4 députés intervenants, comme aux élus régionaux, inquiétudes, voire mécontentements, se sont mêlés à l’idée qu’il faut agir avec ténacité, dans la durée, et regagner confiance et espoir.
Face à «l’ennemi sans visage de la finance», aux mécanismes du capitalisme financier, aux attaques des droites et de son extrême, aux colères sourdes qui gagnent ici ou là , et sous le feu destructeur de certains médias, l’heure était néanmoins plutôt à l’unité dans la diversité des forces de progrès. Même si les points de vue différents n’ont pas été esquivés sur le pouvoir d’achat, la fiscalité, les institutions, la situation économique et sociale ou… les questions de sécurité !
Donc, vous continuerez ces rencontres, mais ne craignez-vous pas qu’un décalage s’instaure entre la gauche et l’électorat ? Ne sentez-vous pas une montée des populismes et de l’extrême droite ?
D.G. : Les conséquences de la domination de l’argent sur l’humain sont souvent terribles. Pour beaucoup de femmes, d’hommes, de jeunes, le présent et l’avenir sont chargés de nuages, les inégalités se creusent, les injustices demeurent. L’avenir apparaît souvent incertain. Le monde est souvent perçu comme dangereux, violent. Alors oui, il faut redoubler d’efforts et souhaiter que nombre de citoyens s’investissent à tous les niveaux pour qu’un réel changement s’opère, que le pays poursuive son chemin, se redresse et que la société, le monde soit plus beaux.
Vous aviez parlé de mettre en place un mouvement ?
DG: Nous sommes en effet nombreux à craindre un enlisement, une désaffection du peuple de gauche et un retour en force des droites. Tout doit être fait pour éviter que 2017 soit un terrible remake de 2002 (où la gauche avait été éliminée), ou de 93. Une droite de plus en plus décomplexée avait été remise en selle, ce qui allait conduire au Sarkozysme et à un travail de sape destructeur des valeurs de progrès et du pacte républicain. Cette fois, ce serait encore plus terrible !
Aussi, si nous sommes nombreux à ne pas aimer la posture du « doigt sur la couture du pantalon » nous avons le sentiment néanmoins que l’heure n’est pas à s’acharner contre la majorité actuelle, à sanctionner le gouvernement ou le président, ni d’ailleurs à se réfugier dans l’abstention ou l’idée du «tous les mêmes» encore moins dans le bleu marine.
Il faut de l’union dans la diversité, de la tolérance. Nul n’a raison tout seul. Les appareils des partis sont souvent étroits et boutiquiers. La haute administration est souvent conservatrice et centralisatrice. Il faut plus de sagesse et que les citoyens de tous les territoires se fassent entendre. Il y a plus besoin de trouver le chemin de réformes, d’une nouvelle croissance, d’avancées sociales et sociétales, d’une politique de progrès efficace comprise et soutenue que de contestations, de critiques et polémiques systématiques…
Alors de nouvelles initiatives se font jour avec Vent d’Ouest ?
DG: Nous avons commencé cette année par deux nouvelles initiatives à Lorient et dans le centre Bretagne. Si nous ne renions pas notre enracinement en Bretagne, nous avons reçu des signaux d’hommes et de femmes de toute la Bretagne et de nombreuses autres régions de France. Nous savons que différentes démarches convergentes se font jour, que la construction d’une composante au cœur de la gauche progressiste et unitaire est nécessaire pour donner aux couches populaires, à nombres d’électeurs, un nouvel espoir, celui de redonner un cap, un souffle à la gauche, une rigueur aussi, face à la domination de l’argent. D’autant que les justes révoltes ou soifs de justice peuvent faire l’objet de tentatives de récupération sectaires et négatives. Oui, un soutien exigeant et lucide me semble nécessaire même si le moment est délicat et l’idée de prendre des responsabilités et une part des difficultés ne m’effraie pas. Il y a besoin d’un espace nouveau.
Aussi, avons-nous saisi l’opportunité d’une rencontre à Rennes avec Robert Hue et le mouvement progressiste qu’il a lancé, faute d’avoir pu gagner une véritable mutation du courant et de la culture communiste et éviter que le PCF ne marche dans les pas de Jean-Luc Melenchon. Celui-ci s’acharnant à diviser la gauche et à s’en prendre à tout le monde, en particulier aux socialistes.
Nous envisageons également prochainement une initiative à Paris.
Cela veut dire que vous rejoignez le mouvement de Robert Hue, le M.U.P, qui reste encore modeste au plan national ?
DG: Robert Hue et ses amis me l’ont suggéré. Je souhaite faire un bout de chemin avec eux. Je souhaite contribuer, aider à construire une composante d’avenir et ouverte de la majorité de gauche et de progrès pour que celle-ci puisse durer et faire avancer notre pays, contribuer à faire bouger l’Europe et le monde. Evidemment, ma démarche est personnelle.
En Bretagne, pas mal de gens me connaissent, ils savent que j’ai rompu avec l’organisation du PCF sans pour autant vouer aux gémonies de tellement d’ hommes et femmes qui ont voulu changer la vie ici, maintenant, qui ont voulu se défendre face aux difficultés.
Avec l’expérience, je sais aussi que dans les différents courants d’idées qui font notre diversité, il ya du bon à prendre chez les uns et les autres mais aussi du moins bon.
Je souhaite continuer avec mes amis de Vent d’Ouest une action de rassemblement avec une certaine tolérance à la bretonne, avec ma façon de faire et mon histoire personnelle. Mais je pense aussi qu’il y a besoin de solidifier quelque chose de nouveau, libéré du vieux carcan hérité du 20esiècle, et faire grandir un courant nouveau, porteur d’une volonté progressiste et de valeurs authentiques.