La refondation de l’organisation de tout le système de santé et de la gouvernance hospitalière sont désormais incontournables. Cette urgence résulte d’une constante dégradation de la situation en raison des politiques publiques libérales successives. Celles-ci sont incompatibles depuis plusieurs décennies avec le fonctionnement de l’hôpital public et il est à craindre que l’accès aux soins pour tous ne soit désormais plus garanti. Ce processus est pourtant réversible au vu des acquis de la loi du 30 avril 1930 créant le premier système complet d’assurances sociales (couverture des risques maladie, maternité, invalidité, vieillesse et décès) et des orientations issues du Conseil de la résistance, dans un pays en ruine, débouchant sur les ordonnances de 1945 qui instituent la Sécurité sociale sous l’impulsion d’Ambroise Croizat.
En dépit de la crise actuelle, la France de 2022 devra pleinement assurer des soins garantis pour toutes et tous et conforter enfin l’hôpital public, pilier essentiel de notre système de santé.
Des moyens nettement insuffisants
En effet, les moyens qui sont alloués à l’hôpital sont aujourd’hui très insuffisants : sous-effectifs, équipements et nombre de lits inadaptés, fermetures de structures de proximité…la gestion administrative des personnels et du flux des malades, la généralisation d’un management fondé sur une maîtrise purement comptable avec des dotations à l’acte, les disparités régionales en nombre d’établissements et d’équipements. Tous ces éléments remettent en cause l’égal accès à des soins de qualité pour toutes et tous au profit d’une médecine libérale à deux vitesses.
Des personnels épuisés, méprisés, malmenés…
Les personnels hospitaliers, toutes catégories confondues, revendiquent depuis des mois des revalorisations de salaires mais également des conditions d’emplois améliorées compte tenu de la maltraitance dont ils sont aujourd’hui l’objet : charge de travail de 12h/jour pendant 6 jours, impossibilité de prendre ou récupérer des congés, polyvalence généralisée…la qualité des soins est en jeu. A cela s’ajoutent le chantage des heures majorées, des primes au mérite, le non remplacement de collègues en arrêt maladie qui accentuent la détresse des équipes et le « burn out » individuel.
Recruter sous statut public
Pour éviter la faillite de l’hôpital public, il sera indispensable que le gouvernement négocie sérieusement avec les syndicats, écoute les usagers et fidélise les professionnels de santé. Il conviendra de réduire drastiquement le recours à l’intérim dont le coût est énorme et d’encadrer rigoureusement les prestations privées de spécialités dans le cadre de l’hôpital. Il faudra recruter sous statut public les très nombreux médecins étrangers contractuels et sous payés sans lesquels de nombreux services ne pourraient fonctionner.
Gérer les formations des personnels hospitaliers
Le manque de réflexion à long terme de l’Education nationale doit aussi être interrogé sur le sujet des carences dans la gestion prévisionnelle des formations. Il s’agit du frein à l’orientation des bacheliers vers un cursus de formation infirmier (IFSI). Le ministère de l’Enseignement supérieur n’est pas en reste avec le retour à une sélection accrue par le passage de la PACES au PASS en 2020 pour les études de médecine avec un « numerus apertus » sous couvert d’une diversification des profils d’accès, déterminé en accord avec l’Agence régionale de santé (ARS) en fonction des capacités d’accueil des établissements médicaux pour les stages.
La cour des miracles…
Si la cour des miracles vous inspire, pour les personnes en situation de précarité, les vieillards à l’abandon, les usagers de drogue, les traumatisés de toute sorte, il faut sans hésiter vous rendre aux Urgences qui mêlent aujourd’hui toutes les détresses humaines dans une attente souvent interminable. Notre projet d’avenir n’est pas de diminuer le fameux « taux d’occupation » comptable en freinant l’accès aux soins, mais au contraire de traiter avec humanité tous les patients sans distinction. Dans les départements les plus pauvres, les Urgences sont en effet devenues l’accès principal aux soins, et cela sans filtre…
Tarification à l’acte et maîtrise comptable des dépenses de santé font sombrer l’hôpital public et la qualité des soins
L’« hôpital de jour », créé dès 1960, permet certes de soulager les services pour des soins réguliers liés à des pathologies dont les guérisons sont longues mais faut-il pour autant vider les hôpitaux de leurs malades et travailler en flux tendu afin de réaliser toujours plus d’économies ? Bien entendu non, car la formule des hospitalisations à domicile s’impose hélas de plus en plus souvent de façon contrainte aux patients mais aussi aux soignants qui craignent un retour rapide des malades avec un état dégradé. On peut raisonnablement douter que dans le contexte actuel les prestations d’accompagnement soient suffisantes pour les personnes isolées, la pénurie de personnels, tout particulièrement d’assistantes sociales et de psychologues, renforçant d’autant la détresse des malades les plus précaires.
Pour 2022, il ne faudra pas se contenter de panser les plaies les plus criantes de l’hôpital public mais penser collectivement à redorer le blason de la santé publique en lui fournissant tous les moyens nécessaires.
Le Mouvement des Progressistes appelle l’ensemble de ses membres et ami.es à participer aux rassemblements organisés samedi 29 mai pour défendre l’hôpital public et l’égal accès aux soins pour toutes et tous.
Jean Couthures, membre du bureau national du Mouvement des Progressistes, responsable du projet