La pratique des camps de rééducation par le travail en Chine s’inspire directement du goulag soviétique auquel sont associés exils et déportations dans différentes régions. Depuis des années, la Chine a pris le tournant d’un capitalisme insatiable nécessitant une masse considérable de travailleurs serviles pour faire tourner l’outil productif à partir des investissements et matières premières pillées dans de nombreuses régions du globe (Asie du S-Est, Afrique…). Par le biais des « nouvelles routes de la soie » doit ainsi s’ouvrir un marché illimité pour les exportations chinoises en direction de l’Europe, garantissant un fort taux de croissance à la Chine.
C’est pourquoi la politique des camps de rééducation par le travail s’est officiellement terminée en décembre 2013 bien que la masse des travailleurs forcés permette de baisser fortement les coûts de production. Les étudiants de la place Tiananmen, les activistes tibétains, les opposants politiques et dissidents ont ainsi été absorbés dans la masse des 2 millions de détenus déjà présents dans les camps dans les différentes régions. Depuis, l’internement a été généralisé pour lutter contre les 3 « grands maux » identifiés par le Parti communiste chinois : les séparatistes, les terroristes et les extrémistes religieux. La lutte pour la promotion de la démocratie, les droits de l’homme, le respect de la loi ou l’autodétermination suffisent à l’accusation de « terrorisme ».
Cette répression accrue s’abat contre les Ouïghours, mais aussi les habitants du Tibet ou de la Mongolie intérieure. L’internement extrajudiciaire de masse se déroule dans des camps associés à des usines, des fermes et des mines de charbon de la région du Xinjiang, véritable « Sibérie » de la Chine. Outre l’internement, la séparation des enfants placés dans des orphelinats, la stérilisation des femmes sont des outils fréquents de coercition. L’appareil policier et la surveillance généralisée, la délation permettent également la persécution des familles des exilés au Népal, au Pakistan et au Kazakhstan. Celle-ci s’accompagne aussi de rapatriements forcés en Chine, avec la complicité des gouvernements qui ne peuvent pas se fâcher avec la première puissance mondiale. Amnesty international évalue aujourd’hui le nombre total de prisonniers entre 4 et 6 millions.
Face à ce constat, l’Union européenne adopte avec courage des sanctions ciblées contre les responsables de la répression des Ouïghours, gel des avoirs financiers de quelques potentats chinois avec interdiction de voyager pour ceux-ci. Cette démarche a depuis été soutenue par les Anglais, les Canadiens et les Américains. En retour, cinq députés européens et un chercheur sont ostracisés et interdits de séjour en Chine. De façon intolérable, l’ambassadeur de Chine en France vocifère des injures contre nos députés sur les réseaux sociaux. Face à cette escalade verbale, la dénonciation par les citoyens des grands groupes européens complices du travail forcé en Chine peut être efficace, comme l’a démontré la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. De plus, la prolifération spontanée de groupes de soutien aux Ouïghours par des citoyens partout en Europe et par des collectivités territoriales devrait aussi permettre d’éviter qu’une bonne conscience ne s’installe qui contribuerait à supporter sur la durée cette situation ignoble pour les droits de l’homme.
Paris, le 25 mars 2021
Jean Couthures
Membre du bureau national du Mouvement des Progressistes
Député suppléant Vitry sur Seine- Alfortville