Dans une interview accordée à La Tribune, Sébastien NADOT, député de Haute-Garonne, responsable national du MdP, qui a participé à la création du groupe Ecologie Démocratie Solidarité promet « Nous serons un groupe constructif ».
Par Pierrick Merlet
Le député de Haute-Garonne, Sébastien Nadot, fait partie des 17 députés du nouveau groupe parlementaire Écologie Démocratie Solidarité. (Crédits : DR)
Exclu du groupe parlementaire de LREM en 2018, le député de Haute-Garonne Sébastien Nadot fait désormais partie du nouveau groupe parlementaire Écologie Démocratie Solidarité. Dans un entretien accordé à La Tribune, l’élu revient sur les raisons de la création de ce groupe, les combats qu’il va mener et promet que ce sera un groupe de propositions. Entretien.
La Tribune – Après votre éviction du groupe parlementaire La République en Marche, en 2018, suite à votre refus de voter le budget, comment vous êtes-vous retrouvé membre de ce nouveau groupe parlementaire ?
Sébastien Nadot – Nous avons annoncé hier, mardi 19 mai, la création de ce nouveau groupe mais cela fait près d’une année que nous travaillons sur la création de ce projet politique. Ce n’est pas une lubie que nous avons eu comme ça, pendant la crise. Pour ce qui me concerne, ayant participé aux réunions de travail en petit comité pour donner naissance à ce projet, il était évident pour moi de l’intégrer. Nous sommes un petit groupe composé de 17 députés, qui a vocation à s’agrandir. Une vingtaine de députés sont prêts à nous rejoindre, mais ils n’ont pas souhaité être dans la première vague car c’est dans celle-ci que nous prenons le plus de coups.
La Tribune – Votre groupe se nomme « Écologie Démocratie Solidarité ». Pourquoi vous et les autres députés avez-vous sélectionné ces trois mots forts pour le nommer ?
S.N. – L’écologie, jusqu’à présent, n’avait pas de représentation au sein de l’Assemblée nationale. C’est d’abord autour de ce sujet que nous nous sommes rassemblés. Avec 17 députés, il devient ainsi le groupe écologique le plus large de l’histoire. Plus globalement, l’enjeu climatique n’est pas assez intégré dans les politiques publiques. Nous allons au devant de très graves problèmes…
Pour ce qui est de la dimension « Démocratie », nous n’arrivons pas à faire suffisamment remonter au sein du Parlement des problématiques, notamment sociales, qui émanent par exemple de manifestations et autres actions. La vie parlementaire est très sclérosée. Il faut tourner davantage le Parlement vers le citoyen. Nous-même, nous plaidons coupable en tant qu’anciens membres de la majorité pour certains d’entre-nous. Nous pensions qu’il aurait été possible de changer les choses au sein de ce groupe, mais cela ne fut pas le cas.
Enfin, en ce qui concerne la « Solidarité », nous avons plus que jamais face à nous une crise économique qui va devenir une crise sociale violente, mais cela, le président de la République n’y est pour rien ! Néanmoins, cet épisode démontre plus que jamais que nous devons trouver de nouvelles formes de solidarité.
La Tribune – Pour revenir sur le volet démocratique, vous êtes donc favorable à une réforme de la Vème République ?
S.N. – Il y a un fort besoin de changer l’institution. Mais il faut être lucide, nous ne sommes pas un groupe majoritaire et seule une majorité peut porter un tel projet. D’ailleurs, cette réforme constitutionnelle était prévue, mais elle a été stoppée par l’affaire Benalla. Suspendue, je peux le comprendre, mais pourquoi arrêtée ? Je ne vois pas pourquoi nous ne sommes pas allés au bout. Ce projet devait être un texte majeur du quinquennat… Maintenant, il est peut-être trop tard pour la relancer, d’autant plus au regard de la situation politique.
La Tribune – Hormis cette réforme constitutionnelle inachevée, quelles sont les autres positions gouvernementales qui vous ont poussé à intégrer cette démarche indépendante ?
S.N. – L’une des critiques que j’ai le plus répété au gouvernement, mais aussi d’autres membres d’Écologie Démocratie Solidarité, est son manque d’écoute et de dialogue criant avec les partenaires sociaux. C’est un gouvernement qui travaille tout seul, mais il assume cette décision, néanmoins il y aura des élections. Le débat est douloureux et prend du temps, mais il est indispensable dans une démocratie.
Par ailleurs, nous sommes un groupe parlementaire composé pour deux tiers de femmes. Mais nous partageons tous une valeur commune en particulier : l’égalité femme-homme. À ce sujet, le gouvernement a fait beaucoup de communication. Certes, c’est bien de vouloir faire évoluer les mentalités par cette méthode, mais ce n’est pas suffisant. Nous comptons mettre ainsi sur la table la proposition d’une revalorisation salariale pour les métiers essentiellement féminins. Par notre taille, nous ne pourrons pas proposer énormément de textes ou en réécrire la totalité de ceux qui nous seront présentés, mais nous comptons nous mobiliser pleinement sur certains sujets et revenir à la source du débat parlementaire.
La Tribune – Que répondez-vous à ceux qui tentent de vous coller l’étiquette de frondeurs ?
S.N. – Nous ne sommes pas des frondeurs. Tout d’abord, parce que cela fait référence aux frondeurs socialistes et de plus, ces derniers ont frondé en restant dans le groupe majoritaire pour en garder les avantages et parce qu’ils avaient des ambitions en vue de l’élection présidentielle pour certains. Alors que nous, nous venons de constituer un groupe en dehors de la LREM, fondé sur une doctrine politique et qui est donc un petit groupe solide, avec des débats internes, comme c’est le cas en ce moment sur l’application numérique Stop-Covid pour lutter contre la propagation du virus.
La Tribune – À ce propos, quel regard portez-vous sur le groupe parlementaire de LREM ?
S.N. – En dehors de l’Assemblée nationale, ce groupe ne vit pas, en plus d’être une coquille vide sur le plan idéologique. Il se contente de traduire sur les plateaux télévisés les textes du gouvernement. Mais être parlementaire, c’est faire évoluer les textes, même quand vous êtes dans la majorité. Et quand vous êtes dans l’opposition également, ce n’est pas s’opposer par principe de s’opposer à un texte du gouvernement. Alors, le groupe Écologie Démocratie Solidarité sera un groupe constructif qui proposera des textes et nous ne prendrons pas de pincette avec ceux du gouvernement. Mais si nous sommes contres, nous le ferons entendre et nous proposerons des alternatives.